Tous les amateurs de photographie ont déjà fait face à cette situation délicate : la prise de vue en basse lumière. Que ce soit lors d'un concert, d'une cérémonie ou d'une soirée, les problèmes de flou, d'autofocus récalcitrant et de bruit numérique sont monnaie courante.
Si vous vous demandez pourquoi vos clichés sont souvent décevants dans la pénombre, c’est qu’il n’y a pas de solution miracle. Le secret pour réussir est de comprendre et d'accepter les compromis techniques.
Nous avons sélectionné les 10 questions que vous nous envoyez le plus souvent pour vous aider à trouver le point d'équilibre technique. Voici les réponses en vidéo (elle date un peu mais les réponses sont toujours d'actualité) ou à l'écrit juste en dessous.
Et pour ceux qui souhaitent vraiment comprendre et maîtriser son appareil photo, J'ai fait une formation complète.
Repères temporels des dix questions :
0:39 min : 1. Quelle vitesse utiliser pour éviter du flou de bouger et/ou du flou de mouvement ?
8:23 min : 2. Comment faire la mise au point en condition de basse lumière ?
12:26 min : 3. Comment avoir un beau piqué en basse lumière ?
16:03 min : 4. Que faire lorsque l’on est contraint d’augmenter ses ISO au delà de la limite acceptable ?
19:35 min : 5. Comment shooter sans flash en basse lumière ?
23:13 min : 6. Comment gérer les situations de plage dynamique extrême ?
26:37 min : 7. Quels sont les réglages pour shooter dans un environnement lumineux variant ?
29:44 min : 8. Quel mode choisir sur son appareil lorsque l’on utilise un flash en mode TTL ?
30:39 min : 9. Est-ce que ISO 800 en argentique est égal à ISO 800 en numérique ?
31:53 min : 10. Comment retirer le bruit généré par une sensibilité ISO élevée en post-production ?
1. Quelle vitesse utiliser pour éviter du flou de bougé et/ou du flou de mouvement ?
Le flou de bougé est l’ennemi numéro un du photographe. Il provient des microvibrations que nous générons lorsque nous tenons l'appareil. Pour le prévenir, il est impératif d'utiliser une vitesse suffisamment rapide pour que ces vibrations n'affectent pas l'image.
La règle empirique du 1 pour 1 vous donne une base solide : vous prenez votre focale (par exemple, 50 mm) et vous la transformez en vitesse d'obturation (1/50e de seconde). C'est la vitesse en dessous de laquelle vous ne devriez pas shooter, sous peine de flou de bougé.
Attention, piège technique ! Cette règle est variable selon la taille de votre capteur :
• Capteur APSC : Appliquez un coefficient multiplicateur de 1,5 à 1,6. Si vous utilisez un 50 mm, vous devriez shooter à 1/75e de seconde (plutôt 1/80e) et non 1/50e. Si vous ne tenez pas compte de ce coefficient, votre vitesse sera insuffisante.
• Capteur Micro 4/3 : Le coefficient multiplicateur est de 2. Un 100 mm se comporte comme un 200 mm, donc la vitesse minimale est de 1/200e de seconde.
Quant au flou de mouvement, tout dépend de la vitesse intrinsèque de votre sujet (figer un escargot n'est pas la même chose que figer une Formule 1).
Il n'y a pas de réglage type ; vous devez faire des essais pour trouver la bonne vitesse. N'oubliez pas que la proximité du sujet (plus il est proche, plus la vitesse doit être élevée) et le sens du mouvement (un mouvement latéral nécessite une vitesse beaucoup plus rapide qu'un mouvement dans l'axe) sont des facteurs cruciaux.
Enfin, le stabilisateur (optique ou mécanique) est d'un grand intérêt pour lutter contre le flou de bougé. Les systèmes les plus performants permettent de gagner entre 1 et 5 diaphragmes.
Cependant, retenez bien ceci : la stabilisation n'a aucune efficacité contre le flou de mouvement.
2. Comment faire la mise au point en condition de basse lumière ?
L'autofocus (AF) ne fonctionne correctement que s'il dispose de zones de contraste. En basse lumière, le problème est que la réduction de l'éclairage tend à réduire les contrastes, ce qui fait patiner votre AF.
Pour vous en sortir :
- Cherchez les zones de haut contraste :
Même dans la pénombre, cette règle prévaut. Placez votre collimateur sur une zone où les différences de luminosité sont importantes, comme sur l'œil de votre sujet. - Privilégiez le collimateur central :
C'est le plus performant, surtout sur les boîtiers d'entrée et de milieu de gamme. Les collimateurs situés vraiment à la périphérie sont souvent beaucoup moins performants, parfois même deux fois moins efficaces que les centraux. - L'hyperfocale :
Dans les cas extrêmes où l'AF est totalement défaillant, vous pouvez utiliser la technique de l'hyperfocale, qui permet de se passer de l'autofocus en réglant l'objectif pour une netteté garantie entre deux distances données.
3. Comment avoir un beau piqué en basse lumière ?
Avoir un beau piqué (la netteté et la qualité d'image) en basse lumière est un véritable casse-tête. Le piqué dépend de trois facteurs principaux :
- Les ISO : Plus vos ISO sont bas, meilleur sera le piqué.
- L'Ouverture : Pour obtenir le meilleur piqué que votre objectif peut fournir, il est souvent nécessaire de fermer de deux ou trois diaphragmes par rapport à l'ouverture maximale.
- La qualité de l'objectif : Facteur intrinsèque à votre matériel.
La dure loi du compromis : Si vous n'avez ni trépied ni flash et que votre sujet bouge, votre appareil photo n'est pas "Superman" et ne peut pas tout faire. Pour compenser le manque de lumière, vous devrez :
- Ouvrir en grand (pleine ouverture), ce qui va à l'encontre du meilleur piqué.
- Augmenter drastiquement les ISO, ce qui provoque inévitablement une perte de piqué et l'apparition du bruit numérique.
Le photographe doit alors trouver le point d'équilibre, la "moins pire des solutions". Cela signifie souvent ouvrir à fond et pousser les ISO bien au-delà de la limite acceptable.
4. Que faire lorsque l’on est contraint d’augmenter ses ISO au-delà de la limite acceptable ?
Parfois, vous êtes contraint de pousser les ISO très haut pour obtenir une exposition correcte et figer le mouvement. La conséquence de cela est l'apparition inévitable de beaucoup de bruit dans l'image. Vous n'aurez pas un beau piqué et pas de bruit numérique dans ces conditions.
Là encore, il n'y a pas de solution miracle. Votre seul choix, si le sujet est immobile, est le trépied, un accessoire absolument indispensable en basse lumière.
Si le sujet bouge, le seul "miracle" possible est d'avoir un meilleur matériel. Un boîtier professionnel récent peut monter autour de 25 000 ISO avec une image qui reste très propre.
Les boîtiers d'entrée/milieu de gamme ou même les anciens haut de gamme (comme le 5D Mark II, par exemple, qui tolère mal de dépasser les 2000 ISO) vous mettront des bâtons dans les roues et vous forceront à faire beaucoup plus de compromis.
Un bon conseil pratique : À moins d'être dans une grotte, il y a toujours quelques petites sources lumineuses. Plutôt que de shooter dans les zones très sombres, attendez que l'action se déroule dans une zone éclairée (comme l'autel dans une église) pour recommencer à photographier.
5. Comment shooter sans flash en basse lumière ?
Que ce soit parce que vous souhaitez conserver l'authenticité de l'éclairage ambiant (concert, cérémonie) ou parce que le flash est interdit, la méthodologie de base pour s'en sortir reste la même :
- Ouvrez à fond votre diaphragme.
- Poussez vos ISO jusqu'à ce que l'exposition soit acceptable.
- Utilisez une vitesse relativement lente, proche de la limite de la règle du 1 pour 1.
Ensuite, vous ajustez finement ces trois facteurs. Le seul vrai levier d'amélioration, sans ajouter de lumière artificielle, est de posséder un meilleur objectif (plus lumineux) ou un meilleur boîtier (qui gère mieux les ISO élevés).
Soyons clairs : si l'appareil photo ne fait pas la qualité intrinsèque de la photo (si le sujet n'est pas intéressant, même un appareil à 10 000 € ne le rendra pas intéressant), il est vrai qu'un bon matériel cher vous facilite la vie techniquement en basse lumière.
6. Comment gérer les situations de plage dynamique extrême ?
Face à des situations de plage dynamique extrême (un cracheur de feu, les bougies d'un gâteau dans le noir, un lampadaire isolé), l'appareil a une capacité limitée à capter à la fois les zones très sombres et les zones très claires.
La règle de base :
Vous devez exposer pour votre sujet principal. Si vous photographiez un cracheur de feu, votre sujet est le cracheur de feu. Le compromis est que vous devrez faire un sacrifice sur le reste et perdre du détail dans les zones d'ombre.
L'échappatoire : le HDR.
La seule façon d'éviter ce choix (exposer pour le sujet ou pour les ombres) est d'utiliser le HDR (High Dynamic Range). Cette technique consiste à compiler plusieurs photos prises à des expositions différentes (on parle de bracketing : sous-exposer à -2, exposer à 0 et surexposer à +2, par exemple). Cela permet de récupérer du détail dans les zones sombres et dans les hautes lumières.
Attention, le HDR ne fonctionne que pour les sujets immobiles (paysages).
7. Quels sont les réglages pour shooter dans un environnement lumineux variant ?
Lorsque vous photographiez un environnement où la lumière change constamment (un concert, une soirée), c'est ce que nous appelons un "univers variant".
La règle d'or est simple : à "univers variant", il faut apporter de "l'invariance".
Pour cela, utilisez impérativement le mode M (Manuel). En mode Manuel, vous maintenez vos réglages constants. La lumière va fluctuer, mais votre appareil prendra une photo bien exposée à chaque fois qu'il y aura un point d'intersection entre vos réglages et la lumière ambiante.
Si vous utilisiez le mode Priorité Ouverture (A ou Av), l'exposition fluctuerait constamment, ajoutant une autre variante à la scène, et vous auriez beaucoup plus de déchets.
Attention : Il n'existe pas de réglage type (telle vitesse, tel ISO, telle ouverture) pour le concert. Il est impossible de vous donner des réglages universels, car ils dépendent de votre matériel et de l'éclairage de la scène. Vous devez maîtriser la technique pour prendre vos propres décisions instantanément.
8. Quel mode choisir sur son appareil lorsque l’on utilise un flash en mode TTL ?
Même en utilisant un flash en mode TTL (qui dose automatiquement la lumière portée sur le sujet), il est recommandé de choisir le mode M (Manuel) sur votre boîtier.
Pourquoi ? Le flash TTL va gérer l'éclairage du sujet, mais c'est le mode Manuel qui vous permet de régler très finement la lumière ambiante ou la lumière du background (l'arrière-plan). Vous contrôlez l'aspect plus ou moins sombre ou clair de l'environnement grâce à vos réglages manuels. Pour aller plus loin, vous pouvez suivre cette formation "Comprendre et maîtriser son flash".
9. Est-ce que ISO 800 en argentique est égal à ISO 800 en numérique ?
Oui et non.
En termes d'exposition :
A priori, 800 ISO est égal à 800 ISO partout. Que vous utilisiez une pellicule à 800 ISO ou que vous régliez votre boîtier numérique à 800 ISO, l'exposition sera équivalente, à de légères variations près entre fabricants.
En termes de rendu :
Cependant, le rendu n'est pas du tout le même. Selon les pellicules argentiques, le 800 ISO peut générer différents niveaux de grain ou des rendus chromiques différents.
10. Comment retirer le bruit généré par une sensibilité ISO élevée en post-production ?
Pour pouvoir retirer le bruit numérique de manière efficace, vous devez absolument photographier en format RAW. C'est la seule façon d'enregistrer un maximum d'informations, car le bruit est très difficile à récupérer sur un fichier JPEG.
Le bruit ne sera jamais retiré parfaitement, mais il peut être atténué. Dans un logiciel de post-traitement comme Lightroom (panneau Détail), deux curseurs sont essentiels :
• Luminance : Ce curseur permet de lisser l'image en réduisant l'aspect granuleux du bruit. Attention : Il faut l'utiliser avec parcimonie. Un lissage excessif fait perdre du détail, notamment sur les peaux, donnant un aspect "papier" ou très étrange.
• Chrominance (Couleur) : Ce curseur est très efficace pour supprimer le bruit chromatique. Le bruit chromatique se manifeste par l'apparition de petits points bleus ou rouges (des "tâches mageanta et rouge") lorsque les ISO sont très élevés ou lorsque vous rattrapez une exposition trop sombre. Lightroom parvient à enlever ces tâches de manière très efficace.
Conclusion : Les Trois Points Essentiels à Retenir
Pour résumer l'essence de la photographie en basse lumière, gardez ces trois points en tête :
1. Acceptez le compromis : En situation difficile, vous ne pouvez pas avoir le beurre et l'argent du beurre. Ne cherchez pas la photo parfaite dans l'absolu, car la perfection n'existe pas sans flash ni trépied en basse lumière. Cherchez plutôt la meilleure photo possible à l'instant T.
2. Vous serez limité par votre matériel : Les situations de basse lumière sont celles où l'investissement financier joue un rôle. Un matériel coûteux vous facilitera la vie et réduira le nombre de compromis nécessaires, tandis que le matériel d'entrée de gamme ou les vieux boîtiers (même haut de gamme) vous mettront des bâtons dans les roues.
3. Maîtrisez la technique photo : Il n'existe pas de réglage type. Votre capacité à vous en sortir dépend de votre maîtrise de la technique photo pour prendre les bonnes décisions instantanément, en fonction de la situation de lumière que vous rencontrez.